Résidence alternée – Jurisprudence Cour d’appel de Rennes (enfant 9 ans)


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES
ORDONNANCE DE MISE EN ETAT
 02 MAI 2017

A rendu l'ordonnance suivante :


Des relations entre Monsieur Franck Y...et Madame Gwenaëlle X...est issu un enfant, Z..., né le 27 septembre 2007, reconnu par ses deux parents.

Le couple parental se séparait courant avril 2015.

Sur assignation en la forme des référés délivrée le 8 septembre 2015 à la requête de Monsieur Franck Y..., le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Nantes a, par ordonnance en la forme des référés rendue le 1er décembre 2015 :
+ dit que l'autorité parentale à l'égard de l'enfant est exercée conjointement par les père et mère ;
+ enjoint aux deux parents d'engager une médiation familiale dans les meilleurs délais et de prendre contact avec l'Association Atlantique Espace Rencontre Famille à Saint-Herblain (44) ;
+ ordonné une enquête sociale et commis pour y procéder Monsieur Frédéric A..., qui aura pour mission de :- vérifier la situation financière et matérielle des deux parents, les conditions d'accueil de l'enfant chez chacun d'entre eux ;
- déterminer à l'avenir le lieu de résidence le plus adapté pour l'enfant et les modalités du droit de visite et d'hébergement de l'autre parent ;
- porter une appréciation sur la résidence alternée mise en place à titre probatoire ;
+ dit que le rapport devra être déposé avant le 25 avril 2016 ;
+ débouté Monsieur Franck Y..., en l'état, de ses demandes d'expertise psychologique de Z... et d'expertise psychiatrique de Madame Gwenaëlle X...;
+ dit que jusqu'à la prochaine décision, la résidence habituelle de l'enfant est fixée en alternance dans le cadre d'une période probatoire de 6 mois, en vertu de l'article 372-2-9 du code civil, selon les dispositions suivantes :
o du vendredi soir à la sortie des classes au vendredi soir suivant, les semaines impaires chez le père sauf meilleur accord, et chez la mère les semaines paires sauf meilleur accord ;
o cette organisation persistant, compte tenu du jour du changement, pendant les petites vacances scolaires, à savoir Noël, février et printemps, à charge pour le parent qui doit accueillir l'enfant d'aller le chercher et de trouver un lieu neutre pour cette remise, à défaut, le commissariat de police de La Beaujoire en tenant lieu ;
+ dit que tout accord entre les parents pourra déroger à ces dispositions ;
+ dit que chacun des parents doit assumer les frais d'entretien de l'enfant lorsqu'il est à son domicile ;
+ fixé à la somme de 130 € par mois le montant de la pension alimentaire due par Monsieur Franck Y...pour l'entretien et l'éducation de son enfant, indexée selon les modalités habituelles, ladite somme étant payable le 1er de chaque mois, d'avance, douze mois par an, au domicile de la mère et sans frais pour elle, en sus des prestations sociales, l'y condamnant au besoin ;
+ précisé que cette contribution restera due tant que l'enfant poursuivra des études, sur justification de sa scolarité, ou ne sera pas autonome ;
+ dit que les frais exceptionnels liés à l'enfant (voyages scolaires, voyages linguistiques, frais d'orthodontie, frais d'optique, frais médicaux non remboursés, permis de conduire) seront répartis par moitié après accord sur leur engagement ;
+ réservé les dépens.

Le rapport d'enquête sociale a été déposé le 15 avril 2016.

Par ordonnance en la forme des référés du 27 juillet 2016, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Nantes a :
o dit que l'autorité parentale à l'égard de l'enfant Z... est exercée en commun par les père et mère ;
o dit que la résidence habituelle de l'enfant est fixée en alternance, selon les dispositions suivantes :

- du vendredi soir à la sortie des classes au vendredi soir suivant, les semaines impaires chez le père sauf meilleur accord, et chez la mère les semaines paires sauf meilleur accord ;
- cette organisation persistant, compte tenu du jour du changement, pendant les petites vacances scolaires, à savoir Tousaint, Noël, février et Pâques, avec un partage par moitié des vacances d'été et par périodes de quinze jours, à charge pour le parent qui doit accueillir l'enfant d'aller le chercher et de trouver un lieu neutre pour cette remise, à défaut, le commissariat de police de La Beaujoire en tenant lieu ;
o dit que tout accord entre les parents pourra déroger à ces dispositions ;
o dit que chacun des parents assume les frais d'entretien de l'enfant lorsqu'il est à son domicile ;
o débouté Monsieur Franck Y...de sa demande visant à voir supprimer la contribution à l'entretien et à l'éducation de l'enfant ;
o confirmé le montant de 130 € par mois de la pension alimentaire due par Monsieur Franck Y...pour l'entretien et l'éducation de son enfant, indexée selon les modalités habituelles, ladite somme étant payable le 1er de chaque mois, d'avance, douze mois par an, au domicile de la mère et sans frais pour elle, en sus des prestations sociales, l'y condamnant au besoin ;
o précisé que cette contribution restera due tant que l'enfant poursuivra des études, sur justification de sa scolarité, ou ne sera pas autonome financièrement ;
o dit que les frais exceptionnels liés à l'enfant (voyages scolaires, voyages linguistiques, frais d'orthodontie, frais d'optique, frais médicaux non remboursés, permis de conduire) seront répartis par moitié après accord sur leur engagement ;
o dit que Z... poursuivra sa scolarité dans le même établissement scolaire qu'il fréquente à Coueron ;

o dit que copie de la présente décision est adressée au juge des enfants ;
o dit que chaque partie supportera les frais et dépens qu'elle a exposés.

Par déclaration reçue le 26 octobre 2016, enregistrée au greffe de la cour le même jour,
Madame Gwénaëlle X...a interjeté appel total de cette décision.

Par conclusions du 9 décembre 2016, Madame Gwénaëlle X...demande à la cour d'infirmer l'ordonnance déférée et de :
* fixer la résidence habituelle de Z... au domicile de la mère ;
* accorder au père un droit de visite et d'hébergement qui pourra s'exercer, sauf meilleur accord : les fins de semaines impaires, du vendredi à la sortie des classes au dimanche à 19 heures ; la moitié des vacances scolaires, première moitié les années paires, seconde moitié les années impaires, les vacances d'été se découpant par quinzaines ;
* dire que Monsieur Y...devra verser à Madame X...une somme de 250 € à titre de pension alimentaire pour l'entretien et l'éducation de son fils, sauf à parfaire au vu des ressources actualisées du père ;
* statuer ce que de droit sur les dépens.

Dans ses écritures du 7 février 2017, Monsieur Franck Y...demande à la cour :
1) à titre principal, de :
- débouter Madame X...de l'ensemble de ses demandes ;
- confirmer l'ordonnance déférée, sauf en ses dispositions relatives au lieu de prise en charge de Z..., celle-ci s'effectuant au domicile respectif de chacun des parents ;
2) subsidiairement, de :
+ ordonner le transfert de la résidence habituelle de Z... au domicile de son père ;
+ fixer le droit d'accueil de la mère de la manière suivante : une fin de semaine sur deux, du vendredi soir à la sortie des classes au dimanche soir à 18 heures ; la moitié de toutes les vacances scolaires, première moitié les années impaires, seconde moitié les années paires, avec fractionnement par quinzaines pour les vacances d'été ;
+ dire que l'enfant passera la fête des mères chez la mère et la fête des pères chez le père ;

+ fixer la contribution maternelle à l'entretien et à l'éducation de Z... à la somme de 80 € par mois, payable d'avance, sans frais pour le créancier, au domicile du père, le premier de chaque mois, avec indexation d'usage ;
3) en tout état de cause, de :
- dire que chaque partie conservera ses frais au titre de l'article 700 du code de procédure civile :
- condamner Madame X...aux entiers dépens, avec application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Par conclusions d'incident du 2 mars 2017, Madame Gwénaëlle X...sollicite, avant dire droit, l'organisation d'un examen médico-psychologique de l'enfant Z... et qu'il soit statué ce que de droit sur les dépens.

Par conclusions en réponse du 23 mars 2017, Monsieur Franck Y...demande de :
- débouter Madame X...de sa demande ;
- déclarer sa demande dilatoire et abusive ;
- condamner Madame X...au paiement de la somme de 800 € à titre de dommages et intérêts au profit de Monsieur Y...;
- condamner Madame X...au paiement d'une somme de 800 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner Madame X...aux entiers dépens de l'incident sur le fondement de l'article 699 du code de procédure civile.

SUR CE :

Pour demander l'organisation d'une mesure d'expertise médico-psychologique concernant l'enfant Z..., Madame Gwénaëlle X...fait valoir que :
* elle a eu confirmation, lors de l'audience tenue par le juge des enfants du tribunal de grande instance de Nantes le 18 janvier 2017, de ce que le grand-père paternel, qui a pour habitude de s'occuper de Z... après la classe lorsque Monsieur Franck Y...travaille, se montrait habituellement violent envers lui ;
* l'enfant est pris dans un conflit de loyauté à l'égard de ses parents, n'hésitant pas à soutenir que le mode de résidence alternée lui convient, alors qu'il est manifeste qu'il ne veut pas peiner l'un ou l'autre de ses parents ; que Z... souffre manifestement de ce mode de résidence ;
* l'enfant reproduit la violence dont il fait l'objet à l'égard de sa mère ;
* chaque semaine, au départ de Z... du domicile maternel, il pleure ;
* ce dernier est très perturbé par la situation actuelle, qui ne répond pas à son équilibre ;
* il est urgent d'ordonner une expertise médico-psychologique de Z... pour lui permettre de s'exprimer tant dans ses choix que dans ses craintes.

Monsieur Franck Y..., pour s'opposer à la demande de Madame X...soutient que :
o il n'existe aucun élément nouveau au soutien de la demande de la mère relative à l'organisation d'une expertise médico-psychologique de Z... ;
o un suivi renforcé de l'enfant a été mis en place par le juge des enfants du tribunal de grande instance de Nantes, lequel a donné lieu à plusieurs évaluations et préconisation de soins ;
o Madame X...a elle-même été invitée à se faire suivre sur le plan psychologique.

Il sera tout d'abord rappelé que les juges sont souverains pour apprécier l'opportunité d'une demande de mesure d'expertise qui leur est soumise.

Sera également relevé le fait que le jugement d'assistance éducative du 25 janvier 2016 précise qu'entendu seul par le juge des enfants, Z... parlait aisément et avec intelligence, indiquant que la mise en place du mode de résidence alternée lui convenait
bien ; qu'il décrivait ses deux parents comme affectueux, soucieux de ses résultats scolaires et attentifs à sa personne.

Par ailleurs, le rapport d'échéance du Service social de protection de l'enfance de Nantes, établi le 13 décembre 2016, indique que Madame X...est en grande souffrance, ne comprenant pas les raisons qui ont amené le juge aux affaires familiales à opter pour un mode de résidence alternée s'agissant de Z... ; qu'elle est dans l'incapacité de se mettre à distance par rapport au conflit parental et d'entendre qu'il existe, dans la situation actuelle, des éléments positifs pour son fils ; qu'elle projette sur Z... ses préoccupations et angoisses, liées notamment à sa prise en charge par son père ; qu'il lui a été proposé un suivi psychologique, mais qu'elle a demandé à réfléchir avant de s'engager dans une telle démarche.

Enfin, force est de constater que ni la décision du juge des enfants du tribunal de grande instance de Nantes du 18 janvier 2017, ni les notes d'audience prises à cette occasion ne font référence à une violence habituelle du grand-père paternel à l'égard de son petit-fils Z....
Ce dernier a également indiqué qu'il pleurait autant lorsqu'en fin de semaine il quittait le domicile paternel que celui de sa mère.

Ces éléments conduisent à estimer que l'organisation d'une mesure d'examen médico-psychologique de l'enfant Z... est inutile, la juridiction du fond disposant de tous les éléments utiles pour statuer.

Madame Gwénaëlle X...succombant à la procédure, il apparaît inéquitable de laisser à la charge de Monsieur Franck Y...les frais irrépétibles non compris dans les dépens. Elle sera donc condamnée à payer à ce dernier la somme de 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu ‘ aux entiers dépens de l'incident.

En revanche, la demande de dommages et intérêts formée par Monsieur Franck Y...au titre de l'abus de droit d'ester en justice sera rejetée.

PAR CES MOTIFS :

Déboutons Madame Gwénaëlle X...de sa demande tendant à voir organiser un examen médico-psychologique de son fils Z... ;

Condamnons Madame Gwénaëlle X...à payer à Monsieur Franck Y...une somme de 500 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Rejetons toutes autres demandes ;
Mettons à la charge de Madame Gwénaëlle X...les entiers dépens de l'incident.

Le Greffier, Le Conseiller de la mise en état,

Voir : Rubrique Avocat droit des pères 
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