Etudes sur l'IMPORTANCE DU RôLE DU PERE
Pendant des années, les chercheurs en psychologie du développement de l'enfant se sont principalement attachés, dans le contexte sociologique de l'époque, à étudier la relation mère-enfant, qui bien entendu revêt toute son importance. Cependant, en ignorant les pères et en privilégiant l'approche dyadique (mère-enfant) la recherche n'a pas mis en valeur l' influence des pères sur le développement des enfants.
C'est sur la base de ces lacunes, qu'ont été mis en place dans les pays occidentaux, les systèmes de garde dits "classiques" privilégiant les mères, et dont les effets ont été (et demeurent dans les pays n'ayant pas basculé dans le régime dans la résidence alternée) catastrophiques pour nombre d'enfants. Heureusement, à la faveurs des évolutions sociétales, les chercheurs s'intéressent de plus en plus aux pères et à la paternité. Depuis une quinzaine d'années, les études fleurissent, et un consensus dans le monde de la recherche s'établi peu à peu autour de l'idée que les pères jouent un rôle unique et essentiel dans le développement des enfants.
Relevons que l'ensemble des études mettant en valeur le rôle du père sont cohérentes avec les études portant sur la résidence alternée. De fait, les enfants en résidence alternées, bénéficiant aussi des apports éducatifs de leurs père ont des indicateurs de réussite et de bien-être similaires à ceux des enfants de parents non séparés.
Rôle du père dans le développement cognitif des enfants
L'apport du père dans l'acquisition du language
Une étude menée par Varghese et Wachen synthétise les conclusions des études publiées sur l'impact de la participation des pères à l'alphabétisation des enfants. Elle passe en revue les facteurs qui influencent les niveaux de participation des pères aux activités d'alphabétisation et leur niveau de contribution au développement du langage. Parmi les facteurs analysés, il en ressort que le niveau de scolarité ou le niveau de revenu du père, le statut de la résidence des enfants, la relation avec la mère de l'enfant sont des facteurs impactant directement l'alphabétisation et les résultats linguistiques des enfants. Il en ressort que les pères apportent une contribution unique et directe à l'alphabétisation et aux résultats linguistiques de leurs enfants grâce à l'utilisation d'un langage complexe, à la participation à des activités de lecture et d'écriture et à des comportements parentaux réactifs. Varghese, C., & Wachen, J. (2016). The determinants of father involvement and connections to children's literacy and language outcomes: Review of the literature. Marriage & Family Review, 52(4), 331–359.
Une méta-analyse de 66 études, pour déterminer la relation entre la participation du père et les résultats scolaires des écoliers a été menée par le professeur William H. Jeynes de l'université de Californie. Les résultats indiquent que l'association entre la participation du père et les résultats scolaires des jeunes dans leur ensemble est statistiquement significative. William H. Jeynes, Meta-Analysis: The Relationship Between Father Involvement and Student Academic Achievement, mars 2014, Sage Journal, Vol 50, Issue 4, 2015.
Une étude menée E. Duursma, "a examiné la fréquence de lecture paternelle et maternelle de livres chez 430 familles à faible revenu et a examiné si la lecture paternelle de livres et la lecture maternelle prédisaient le développement linguistique et cognitif précoce des enfants et les compétences émergentes en littératie. Les résultats ont montré que les mères lisent plus fréquemment à leurs tout-petits que les pères, mais qu'environ 55 % des pères ont déclaré lire au moins une fois par semaine à leurs enfants. La lecture paternelle de livres à 24 et 36 mois prédisait de manière significative le langage et les compétences cognitives des enfants à l'âge de 36 mois ainsi que leurs compréhension des histoires à la maternelle. La lecture de livres par les mères n'est qu'un prédicteur significatif des compétences cognitives des enfants à 36 mois". Source : E. Duursma The effects of fathers’ and mothers’ reading to their children on language outcomes of children participating in early head start in the United States, 2014, publié dans "Fathering: a journal of theory and research about men as parents "
Une méta-analyse de 2007 de littérature scientifique a montré que l'engagement du père a des effets significatifs sur la cognition et le langage des enfants à 24 et 36 mois et sur leur développement social et émotionnel à 24, 36 mois et avant la maternelle. Elle met en évidence que le soutien des pères est important pour le développement du langage, cognitif et du langage des enfants à travers les âges et la régulation émotionnelle à 24 mois. Selon les chercheurs ces résultats suggèrent que les programmes qui visent à accroître l'éducation des pères et qui promeuvent et encouragent le rôle parental positif des pères produiront de grands avantages pour les enfants. Cabrera, Natasha & Shannon, Jacqueline & Tamis-LeMonda, Catherine. (2007). Fathers' Influence on Their Children's Cognitive and Emotional Development: From Toddlers to Pre-K. Applied Developmental Science - APPL DEV SCI. 11. 208-213. 10.1080/10888690701762100.
Une étude longitudinale de 2020 sur 1 258 enfant destinée a étudier l'influence des niveaux de stimulation cognitive des mères, des pères et des prestataires de gardes (assistantes maternelles, crèches) a montré des effets positifs directement observables de la stimulation cognitive précoce des pères sur les compétences précoces en lecture et en mathématiques des enfants âgés de 48 et 60 mois. Les conclusions postulent pour améliorer l'inclusion des pères dans les études de stimulation cognitive à domicile. Natasha J. Cabrera, Ui Jeong Moon, Jay Fagan, Jerry West, Daniela Aldoney, Cognitive Stimulation at Home and in Child Care and Children’s Preacademic Skills in Two-Parent Families, Revue Child Developpement, Volume91, Issue5 September/October 2020
L'apport du père dans l'acquisition des fonctions exécutives :
Meuwissen AS, Carlson SM. Fathers matter: The role of father parenting in preschoolers' executive function development. J Exp Child Psychol. 2015 Dec;140:1-15.
Résumé : Bien que des travaux antérieurs aient montré que le rôle parental des mères influence le développement de la fonction exécutive de l'enfant ( compétences importantes en maîtrise de soi développées au cours des années préscolaires), le rôle du rôle parental des pères n'a pas été étudié en profondeur. Nous avons observé les pères dans le jeu dyadique avec leurs enfants de 3 ans . Nous avons constaté que le rôle parental des pères était significativement inversement lié aux fonctions exécutives des enfants, indépendamment du revenu familial et des capacité d'élocution des enfants. Ces résultats concordent avec l'hypothèse selon laquelle les pères sont importants pour le développement des fonctions éxécutives chez leurs enfants et suggèrent que les pères devraient être inclus dans la recherche et les interventions parentales.
L'apport du père dans l'apprentissage des mathématiques :
Min Ma, Danfeng Li, Li Zhang, Longitudinal prediction of children's math anxiety from parent-child relationships, Learning and Individual Differences,Volume 88, 2021.
Résumé :L'anxiété mathématique est très répandue et a donc reçu une attention considérable. Cependant, seules quelques études transversales ont examiné l'influence des relations parent-enfant sur l'anxiété mathématique. Nous avons mené une étude longitudinale pour tester l'effet des relations père-enfant et mère-enfant sur l'anxiété mathématique des enfants. Notre échantillon comprenait 287 élèves du primaire qui ont déclaré leur relation père-enfant, leur relation mère-enfant et leur anxiété mathématique à deux moments d'intervalle d'un an. La cohésion familiale a été utilisée comme indicateur de la relation parent-enfant. Les modèles croisés ont indiqué que la relation père-enfant, plutôt que la relation mère-enfant, prédisait l'anxiété mathématique des enfants, même après avoir pris en compte le sexe des enfants, l'âge des enfants, l'anxiété d'apprentissage des enfants, l'anxiété sociale des enfants, la motivation d'apprentissage des enfants, la performance mathématique des enfants. Cette étude souligne l'importance de la relation père-enfant dans l'anxiété mathématique des enfants.
Pougnet, Erin & Serbin, Lisa & Stack, Dale & Schwartzman, Alex. Fathers' Influence on Children's Cognitive and Behavioural Functioning: A Longitudinal Study of Canadian Families. Canadian Journal of Behavioural Science/Revue canadienne des sciences du comportement. 43. 173-182. 10.1037/a0023948 (2011).
Rôle du père dans le comportement des enfants
Résumé : "Les pères qui affichent des comportements activation parentale fréquents et de haute qualité encouragent les enfants à prendre des risques, défient les enfants physiquement et socio-émotionnellement et fixent des limites appropriées lors de la stimulation des interactions pour assurer la sécurité et prévenir la surexcitation. Conformément aux théories sous-jacentes, il a été constaté que l'activation parentale paternelle de qualité dans la petite enfance était associée aux compétences d'autorégulation des enfants et que l'activation parentale paternelle de mauvaise qualité était associés à des problèmes d'introversion et d'extériorisation".
Annabel Amodia-Bidakowska, Ciara Laverty, Paul G. Ramchandani,, Father-child play: A systematic review of its frequency, characteristics and potential impact on children’s development, Developmental Review,Volume 57, 2020,100924,ISSN 0273-2297,
Résumé : "(..). La grande majorité des recherches précédentes se sont concentrées sur les interactions mère-enfant, mais le rôle positif potentiel de la participation précoce des pères à la vie des enfants est de plus en plus reconnu, avec des niveaux plus élevés de soins par les pères dans de nombreux pays. Pour caractériser la nature et l'impact potentiel du jeu père-enfant, nous avons entrepris une revue systématique de la littérature publiée dans des bases de données psychologiques et éducatives jusqu'en 2018. Résultats : (..), les pères passent une proportion importante de leur temps avec leurs enfants à s'engager dans des interactions ludiques, souvent sous la forme de jeux physiques. (..) la fréquence des jeux des pères augmente de la petite enfance à l'âge préscolaire avec une baisse ultérieure du jeu à mesure que les enfants atteignent la petite enfance et la moyenne. (..) les résultats pour l'enfant suggèrent que le jeu des pères dans les premières années peut contribuer positivement aux résultats sociaux, émotionnels et cognitifs des enfants. (..)".
Absence du père et santé mentale des enfants :
Culpin, Iryna & Heuvelman, Hein & Rai, Dheeraj & Pearson, Rebecca & Joinson, Carol & Heron, Jon & Evans, Jonathan & Kwong, Alex. (2021). Father absence and trajectories of offspring mental health across adolescence and young adulthood: findings from a UK-birth cohort. 10.1101/2021.08.25.21262549.(pré-publication Août 2021).
Résumé : Etude est basée sur jusqu'à 8 409 enfants de l'Étude longitudinale Avon sur les parents et les enfants (ALSPAC). Les participants ont fourni des autodéclarations de dépression (horaire d'entrevue clinique révisé) à l'âge de 24 ans et de symptômes dépressifs (questionnaire sur la courte humeur et les sentiments) entre 10 et 24 ans. L'absence biologique du père dans l'enfance a été évaluée au moyen de questionnaires maternels à intervalles réguliers de la naissance à 10 ans. Il ressort de cette étude que l'absence du père au début, mais pas au milieu de l'enfance, était fortement associée à une augmentation des chances de dépression des enfants et à des symptômes dépressifs plus importants à l'âge de 24 ans. L'absence du père dès la petite enfance était associée à des trajectoires plus élevées de symptômes dépressifs pendant l'adolescence et le début de l'âge adulte . (..). Les filles dont le père était absent dans la petite enfance, manifestaient des niveaux plus élevés de symptômes dépressifs tout au long de l'adolescence, mais cette différence s'est réduite au début de l'âge adulte. En revanche, les garçons qui ont connu l'absence d'un père dans la petite enfance avaient des trajectoires similaires de symptômes dépressifs par rapport au groupe dont le père était présent, mais ont connu une forte augmentation au début de l'âge adulte. Les filles dont le père était absent au milieu de l'enfance ont manifesté des trajectoires plus élevées entre le milieu de l'adolescence et le jeune âge adulte que le groupe père présent. Conclusions : Nous avons trouvé des preuves que l'absence du père dans l'enfance est constamment associée à la dépression des enfants à l'adolescence et au début de l'âge adulte et que cette relation varie selon le sexe et le moment du départ du père.
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